L’eau : une affaire de famille
Sur la planète, l’eau, l’assainissement et l’hygiène se sont améliorés. Pourtant, en 2015, 663 millions de personnes n’ont pas accès à un point d’eau amélioré.
Il y a l’eau que l’on boit, avec laquelle on cuisine, l’eau pour se laver les mains, pour faire la vaisselle, la lessive, aller aux toilettes, l’eau pour cultiver et faire de l’élevage.
Pour UNICEF, le photographe Ashley Gilbertson (VII Photo) s’est rendu dans 7 pays, à la rencontre de familles. Quelle est leur consommation quotidienne d’eau ? 20 photos pour découvrir leurs habitudes en Bolivie, en Inde, en Jordanie, au Myanmar, au Niger et aux Etats-Unis, ainsi que leurs témoignages.
Bara Bangou, région de Tillabéri, Niger
80 litres d’eau par jour
Fouré Moussa puise les 80 litres d’eau que sa famille utilise quotidiennement dans un puits situé à 2 kilomètres de chez elle. Pour éviter les longues files d’attente, elle préfère y aller la nuit. Ce trajet représente 1 heure aller/retour et il lui faut 15 minutes pour remplir un container.
Totorenda, région de Chuquisaca, Bolivie
140 litres d’eau par jour : 30 litres pour faire la cuisine et pour boire, 45 litres pour faire l’évacuation d’eau des toilettes, 55 litres pour se doucher, et 10 litres pour faire la vaisselle et la lessive.
René Visalla et sa famille, membres de la communauté des Guaraní, utilisent 140 litres d’eau par jour.
“L’eau courante et les toilettes sont un gage de sécurité et nous protègent, notamment des serpents car sans toilettes, nous devions faire nos besoins à l’air libre.”
Chikosa, région de Dowa, Malawi
100 litres d’eau par jour : 40 litres servent à se laver, 20 litres à faire la cuisine et à boire, 20 litres à faire la lessive et 20 autres à faire la vaisselle.
La famille de Rhoda January puise 100 litres d’eau par jour dans un puits de forage récent. Auparavant, ils devaient s’approvisionner à des puits de surface.
“L’eau était mauvaise… Nous aurions du y ajouter des produits chimiques pour la purifier, mais nous n’en n’avions pas les moyens.”
Région de Dowa, Malawi
120 litres d’eau par jour : 40 litres servent à la toilette, 40 litres à boire et faire la cuisine, 20 litres pour la vaisselle et 20 litres pour la lessive.
La famille de Felix Siliya puise ses 120 litres d’eau quotidiens dans un puits situé à 700 m de chez elle. Auparavant, le puits le plus proche se situait à 5km.
« Quand il fallait aller chercher de l’eau si loin, je ne pouvais pas en porter beaucoup et nous en manquions toujours. »
El Alto, Bolivie
100 litres d’eau par jour : 16 litres pour faire la cuisine et boire, 6 litres pour faire la vaisselle, 30 litres pour la lessive, 40 litres pour se doucher, 6 litres pour se laver les mains, et 2 litres pour se laver la figure.
La famille Esteban vit dans le District 7, l’un des quartiers les plus pauvres d’El Alto, où ils utilisent 100 litres d’eau par jour.
« Dans ma vie et chez moi, la chose la plus importante est l’eau. Sans elle, nous ne pouvons pas vivre. »
Jordanie
8 000 litres d’eau par jour : 200 pour la famille, 7 800 pour le troupeau de 700 brebis.
La famille d’Abu Ibrahim, membre d’une communauté de Bédouins, mène une vie nomade. Leurs déplacements sont liés à la recherche d’eau et de nourriture pour leur troupeau.
“Les Bedouins connaissent mieux la valeur de l’eau que les citadins.“L’eau est à leur portée. Pas nous : nous devons faire d’immenses efforts et de longs voyages pour trouver l’eau.”
Totorenda, région de Chuquisaca, Bolivie
120 litres d’eau par jour : 20 litres pour cuisiner, 35 pour vider les toilettes, 15 pour se doucher, 10 pour la lessive, 35 pour faire la vaisselle et seulement 5 pour boire.
La famille Flores est membre de la communauté Guaraní. Il s’agit, en proportions, du 3ème groupe ethnique du pays. Historiquement, ceux-ci ont été réduits à l’esclavage par les grands propriétaires terriens et, bien qu’émancipés par le gouvernement , nombre d’entre eux continuent d’être contraints au travail forcé, à la servitude, et à un piètre respect de leurs droits.
Région de Chuquisaca, Communauté Puca Huasi, Bolivie
100 litres d’eau par jour : 10 litres pour boire et manger, 50 litres pour les toilettes, 25 litres pour se laver et 15 litres pour faire la vaisselle et la lessive.
La famille Miranda élèves des poulets, des abeilles pour le miel et cultive des oranges. Mais dans leur communauté, l’eau n’est fournie que pour l’usage domestique, soit 100 litres. Pour le reste, il doivent se la procurer par leurs propres moyens.
Région de Dowa, Malawi
100 litres d’eau par jour : 20 litres pour boire et manger, 20 litres pour la lessive, 30 litres pour se laver et 10 pour faire le ménage.
Mercy Katondo, agent de santé communautaire et mère célibataire, utilise avec ses filles 100 litres d’eau puisés dans un point d’eau du quartier.
« Je mène une vie difficile car je dois tout trouver moi-même pour moi et mes filles. Heureusement que le point d’eau est proche. »
Diajourou, région de Tillabéri, Niger
100 l d’eau par jour
La famille d’Hamidou Hama a trois moyens de se procurer sa ration d’eau quotidienne : dans les étangs insalubres créés par les eaux de pluies, en payant l’eau à un point d’eau voisin (seulement ouvert à certaines périodes), ou dans un puits de forage éloigné.
“Je sais que mes enfants aiment jouer et se baigner dans l’eau de l’étang mais ça ne me plait pas. Cette eau transmet des maladies et l’année dernière, nous avons même connu des cas de choléra.” dit Madame Hama.
Camp de réfugiés de Za’atari, Jordanie
380 litres d’eau par jour
La famille Abu Noqta, des réfugiés syriens vivant dans le camp de Za’atari, ont besoin de 380 l d’eau par jour, dont une partie leur sert à se rafraîchir tant la chaleur est accablante.
« Nous utilisons l’eau avec parcimonie car nous en avons peu » dit Mme Abu Noqta. “Et nous redoutons un jour ou l’autre de ne plus être approvisionnés.”
Shakdah, Région de Nadia, Bengal Occidental, Inde
80 litres d’eau par jour
Somashree Saha est agent de santé. Elle, sa sœur et sa mère puisent quotidiennement 80 litres d’eau à une pompe manuelle. Comme cette eau contient beaucoup de fer, elle prend une couleur trouble au contact de l’oxygène, diffuse une odeur nauséabonde et peut provoquer des problèmes de digestion.
Mehana, région de Tillabéri, Niger
60 litres d’eau par jour
Chaque jour, Mahamadou Moussa et sa famille ont besoin de 60 litres d’eau qu’ils filtrent pour boire et cuisiner. Ils n’ont pas d’autre choix que de se laver dans le fleuve Niger, bien qu’ils sachent que le fleuve est porteur de maladies comme la diarrhée et le choléra.
Shakdah, Région de Nadia, Bengal Occidental, Inde
220 litres d’eau par jour : 30 litres pour cuisiner et pour boire, 60 litres pour se laver, 20 litres pour faire le ménage, 70 litres pour la lessive et la vaisselle, et 40 pour Kangali : leur vache.
Swarga Mala Gayali vit avec son mari et sa famille. Avant l’installation d’une pompe manuelle, elle devait faire plusieurs centaines de mètres quarante fois par jour pour aller chercher l’eau chez des voisins.
Myay Yint, région de Magway , Myanmar
160 litres d’eau par jour : 20 litres d’eau sont bus, 40 litres servent à se laver, 60 litres servent à faire la cuisine et la vaisselle, et 40 autres litres à faire la vaisselle.
La famille de San Win cultive des arachides sur son terrain d’un hectare et demi. Comme les autres villageois, cette famille n’a pas l’eau courante. Comme 300 autres familles, ils puisent donc l’eau dans un conduit vieux de 15 ans se situant à l’école du quartier.
Région de Dowa, Malawi
120 litres d’eau par jour : 30 litres servent à faire la cuisine et boire, 20 litres pour faire la vaisselle, 20 pour le ménage et 50 pour se laver.
Monsieur Malenga tient une petite épicerie, et sa femme s’occupe des enfants. Tous vont à l’école y compris Stanley, 4 ans, qui est en maternelle.
« Avant, nous puisions l’eau dans un puits de surface. Elle n’était pas aussi propre que celle qui vient du puits de forage que nous utilisons maintenant, et nous avions la diarrhée. Des voisins ont même attrapé le choléra », dit M. Malenga.
Murali Para, région de Malda, Bengal Occidental, Inde
220 litres d’eau par jour : 50 litres pour boire et faire la cuisine, 70 litres pour les WC et 100 litres pour se laver.
Atiphon Sarker, ses quatre fils et leurs familles partagent une maison. Ils ont très peu d’eau et font donc la vaisselle et la lessive dans un étang. Autant que possible, ils puisent l’eau dans un puits tubé situé à 200 m de chez eux.
“Cette eau vient de 400 m de profondeur. Elle est donc fraîche et bonne. Mais il n’y a qu’un seul puits pour 100 familles, alors il est en panne une ou deux fois par mois. Et il faut une semaine pour le réparer.”
Camp de réfugiés de Za’atari, Jordanie
300 litres d’eau par jour
La famille Al Hoshan a fui la ville de Mahaja, en Syrie, en février 2013, après que leur maison ait été détruite en raison du conflit. Une citerne contenant 2 mètres cube d’eau est mise à disposition par l’UNICEF et alimente toute la rue.
“L’endroit où l’on vit ne peut pas être considéré comme un village. Un village serait plus propre. C’est un désert. On peut faire tous les efforts pour en faire une ville, ça restera toujours un désert.” dit Madame Al Hoshan.
Hnen Ser Kyin, région de Magway , Myanmar
100 litres d’eau par jour : 20 litres pour boire, 20 pour faire la cuisine et les 60 litres restant pour faire la lessive et se laver.
Nyo Oo, couturière, son mari Kyaw Soe et leurs trois filles utilisent 100 litres d’eau par jour, puisés principalement du puits de forage local. Pendant la saison des pluies, pour faire des économies, ils utilisent aussi l’eau d’un étang pour se laver malgré les risques de contamination.
West Village, New York, États-Unis
1000 litres par jour : 100 litres pour chasser l’eau des toilettes, 300 litres pour les douches et les bains, 200 litres pour se laver les mains et faire la vaisselle, 80 autres pour le lave-vaisselle, 100 litres pour faire la lessive, 50 litres pour boire et cuisiner, et enfin 150 litres pour arroser leur jardin et faire le ménage.
Le photographe Ashley Gilbertson a réalisé ce reportage pour UNICEF afin de documenter la consommation d’eau des familles à travers le monde.
“J’ai voyagé dans le monde entier ces derniers mois pour cette campagne et je suis choqué par la quantité d’eau que consomme ma famille à New York. Je savais bien que ce serait nettement plus que dans certains pays, mais pas à ce point.”
“J’ai aussi été frappé par la lutte continue pour les droits des femmes dans certains pays. Je suis révolté par la façon dont les femmes sont très souvent traitées : elles font un travail de titan et sont traitées comme des objets.